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Gérer par consensus, comment faire ?

La gestion par consensus est aujourd’hui très à la mode et une qualité exigée de tous les décideurs. Mais, comment arriver à développer un consensus efficace qui fait que les parties prenantes s’engagent, condition essentielle pour assurer le succès de toute décision ou projet ? 

Rédigé par Yves-C GAGNON - Mis à jour le 22/04/2022

Qu'est-ce que la gestion par consensus ?

Le développement du plus large consensus possible au sein des parties prenantes est non seulement valorisé par les experts, mais souvent imposé par des lois ou inscrit dans les contrats types des différents bailleurs de fonds. On parle de décision ou projet partagé, de lean management , d’entreprises socialement responsable, de gouvernance négociée, d’acceptabilité sociale, de développement durable, d’optimisation de l’action publique, etc.

Même pour obtenir une certification de qualité ISO, les organisations doivent démontrer qu’elles comprennent et prennent en compte les enjeux [1] des parties prenantes dans toutes leurs décisions et activités. Cela n’est pas très surprenant, car comment prétendre faire de la qualité sans tenir compte du point de vue, des attentes et, surtout, des savoirs singuliers de chaque partie intéressée.

Par partie prenante ou intéressée, on entend une personne ou un groupe, organisé ou non, interne ou externe à l’entreprise, qui peut soit influer sur une décision ou une activité, soit être affecté ou s’estimer affectée par elle (ISO9001). Cette dernière mention «  s’estimer affectée  » renvoie directement à la perception, par essence incontrôlable par un porteur de dossier. De plus, qui dit perception dit représentation personnalisée et particulière engendrant instantanément une émotion, une réaction affective.

La gestion par consensus loin d’être une pratique répandue

Peu de décideurs ou d’entreprises ont une approche formelle lorsque vient le temps d’interagir avec les parties prenantes pour développer un consensus efficace. Demandez-leur de vous montrer leur guide ou lignes directrices pour ce faire et vous allez voir leur visage s’allonger!

La plupart du temps, chacun s’appuie sur ses dons de communicateur et son leadership pour essayer de susciter l’engagement des parties prenantes. Bien qu’elles soient fort utiles, les aptitudes interpersonnelles sont loin d’être suffisantes. C’est d’ailleurs ce qui contribue sans doute à expliquer que la démarche s’amorce presque toujours trop tardivement, lors de l’identification ou la promotion d’une solution et non pas pour définir le problème ou le projet comme cela devrait. Pourtant, même Albert Einstein insistait sur le fait que la bonne solution se trouve dans la façon de poser le problème, de le formuler. Il va plus loin en affirmant qu’un problème sans solution et un problème mal posé.

Par ailleurs, comme le définit McEwan (1996), un consensus efficace est une opinion collective à laquelle arrive un groupe dont les membres communiquent entre eux et se soutiennent mutuellement. Dans cette atmosphère où règne la confiance et le respect mutuel, chacun a le sentiment de pouvoir influencer la décision, le projet . Indéniablement, un tel consensus passe par la co-construction de la formulation du problème qui doit se modeler aux enjeux de chaque partie prenante.

Le management POUR les parties prenantes

Tant Crozier (2014) que Cyert et March (1992) ont clairement montré que les parties prenantes ont des intérêts différents, presque invariablement irréconciliables. Cela explique que l’entreprise est le terrain des jeux d’influences et des relations de pouvoir. Dans ce sens, elle n’est définissable que comme un ensemble de coalitions.

Ce faisant, pour arriver à développer un consensus et susciter l’engagement des parties prenantes, toujours circonstanciel, il est essentiel de gérer POUR elles et non pas essayer de les gérer comme on le voit la plupart du temps. En effet, il est utopique de croire que l’on peut exercer un contrôle, diriger ou même influencer leurs enjeux spécifiques. C’est souvent ce qui conduit à penser qu’il est possible de les mobiliser en adoptant une approche réactive visant à réduire les impacts négatifs pour combattre leur résistance ou développer un certain consensus spécifique quant à la solution, ne pouvant être qu’artificiel. Plus grave encore, toute tentative d’engager sur ces bases des contacts avec les parties prenantes créer une perception négative récurrente qui est extrêmement difficile à changer.

Il est préférable d’être proactif en les impliquant et les responsabilisant. Les décisions et les projets doivent être le résultat de négociations menées par des dirigeants jouant le rôle d’animateur et de guide, gérant POUR les parties prenantes. Au lieu de s’attarder à la conformité en tentant d’inciter ces dernières à collaborer, on cible plutôt le résultat, en s’assurant de prendre en compte leurs enjeux spécifiques.

Il ne s’agit donc pas de se contenter d’identifier les parties prenantes, de les interroger sur leurs enjeux et leurs perceptions, mais bien d’amorcer un dialogue, une négociation avec chacune afin d’arriver à une formulation du problème qu’elle peut faire sienne. Cela repose sur un modèle de gouvernance favorisant une culture de relations avec les parties prenantes, qui se transforme en capital de réussite extraordinairement efficace. C'est une conception fondée sur des pourparlers constructifs où l'on s'assure que chacun trouve son intérêt à coopérer. D’ailleurs, un tel engagement collectif est l’élément essentiel à l’émergence de solutions créatives.

Une méthode pour développer un consensus efficace

La méthode de formulation de problèmes a précisément comme objectif de développer un consensus efficace. En effet, il s’agit de réaliser un processus d’analyse de la situation problématique telle qu’elle est vécue et perçue sur le terrain , de façon à aider les parties prenantes à en dégager une représentation partageable par chacune d’elles, suscitant ainsi son engagement vis-à-vis sa résolution. 

Les différentes étapes de la démarche sont présentées dans le graphique ci-dessous.

 

gestion consensus  

Tout de suite on voit que cette démarche exclut certains a priori contre-productifs, comme :

    • Évaluer avant d’examiner la nature et la représentation du problème.
    • Comparer à d’autres expériences, à la recherche de simi­larités au détriment des aspects uniques et spécifiques du problème.
    • Aborder le problème à partir de ce qui apparaît évident plutôt que de dépister ce qu’il sous-tend.
    • Diriger la décision sur l’optimisation d’un objectif, en négligeant le fait que tout problème en implique plusieurs.
    • Essayer de simplifier le problème pour en faciliter la résolution.
    • Mettre l’accent sur le choix d’une solution plutôt que la formulation, sous prétexte que l’on sait déjà quel est le problème.
    • Envisager amener une partie prenante à mettre en sourdine sa position, ses enjeux stratégiques ou son pouvoir.

Tout décideur qui souscrit à l’un ou l’autre aura de la difficulté à concrétiser le consensus promis. En effet, la formulation de problèmes vise à mettre en évidence toutes les dimensions d’une situation problématique et établir son historique, en apportant une attention particulière aux controverses qui portent sur le contenu et le sens des faits. Tous les points de vue doivent être pris en compte, quelles qu’en soient les différences ou même les contradictions. Le piège de l’efficacité lié à identifier rapidement une solution doit être évité à tout prix.

Encore plus important, la qualité de la démarche pour arriver à cette formulation partageable du problème est aussi, sinon plus importante que son contenu. Effectivement, la valeur d’une solution se juge a posteriori ; elle est bonne parce qu’elle a marché; parce qu’elle a permis de résoudre définitivement le problème. Elle a marché parce que le processus suivi a convaincu chacune des parties prenantes de s’y engager.

Bien sûr, il serait trop long d’expliquer chacune ici. Pour ce faire, j'ai publié un guide très détaillé qui vous offre un accompagnement tout au long du processus . Il est très pragmatique, reposant notamment sur un exemple concret que vous pourrez suivre.

[1] Ce qu’elle estime avoir à perdre ou à gagner
YC Gagnon

Auteur - Yves-C GAGNON

Yves-C. est Expert-conseil en gestion du changement et management des technologies (MIS).

Il a d’abord été cadre supérieur dans différentes entreprises, de même que Consultant senior au sein d’un cabinet international d’audit et de conseil. Par la suite, il a entrepris une carrière de professeur d’université où il a conçu différents guides de gestion. Cela l’a amené à présenter de nombreuses conférences, concevoir et donner plusieurs formations professionnelles, de même qu’agir comme coach et consultant à l’international.

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Cet article est référencé dans : Comment manager une équipe ? - Manager les parties prenantes d'un projet - Parties prenantes de l'entreprise : les identifier et les gérer -

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